Energie - Chimie - Matériaux : nouveau défi pour l’agriculture

Après le défi de l’autosuffisance alimentaire, l’agriculture est aujourd’hui attendue pour un nouveau défi : diminuer les émissions de gaz à effet de serre, stocker du carbone, ...

De nouveaux marchés

Le développement des bioproduits est considéré comme stratégique. Les Etats-Unis, par exemple, ont mis en place le “Bioprefered” : les collectivités doivent privilégier le recours aux bioproduits dans leurs marchés publics. En France, la loi de transition énergétique réaffirme des ambitions pour les agro-ressources. Elle encourage, par exemple, l’utilisation des sacs plastiques biosourcés. Elle prévoit aussi d’augmenter la valeur de la tonne de carbone de 22 € actuellement à 56 € en 2020 et 100 € pour 2030 dans la Taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques (TICPE), taxe dont la biomasse est exonérée puisque le carbone qu’elle contient est renouvelable ! En 2020, la biomasse devrait contribuer pour moitié à l’objectif de 23 % d’énergies renouvelables.De la peinture aux cosmétiques en passant par les isolants, la biomasse est déjà présente dans la vie de tous les jours. Une étude commanditée par l’Ademe en 2014 estime que les volumes de productions devraient croître d’ici 2030 (tableau 1).

L’or vert pour succéder à l’or noir ?

Fournir les agro-ressources nécessaires aux secteurs de l’énergie, de la chimie et des matériaux, constitue une opportunité de consolider les exploitations en diversifiant les débouchés et en créant de la valeur. C’est aussi l’occasion de développer de nouvelles activités agricoles et industrielles dans les territoires, relocaliser des productions et stimuler l’emploi dans les bassins de production.L’agriculture pourra accéder à ces nouveaux marchés sous réserve d’atteindre les exigences de performance attendues par les professionnels et de garantir un approvisionnement régulier en quantité et en qualité : une réalité parfois complexe lorsque l’on travaille avec le vivant et la météo ! Il faudra aussi organiser les réseaux locaux d’une offre compétitive par rapport au marché existant. Par exemple, un bioplastique coûte aujourd’hui de 20 à 200 % plus cher qu’un plastique traditionnel. Pour que les filières se développent localement et que l’or vert succède à l’or noir, il faudra aussi développer leur attractivité au sein de l’exploitation en générant des marges à minima comparables aux productions existantes ou en apportant des plus-values pour les systèmes d’exploitation (atout agro-écologique, organisation du travail…).

La Chambre d'agriculture : un partenaire pour réussir la valorisation des agro-ressources

Les Chambres d’agriculture, mobilisent leurs expertises, au côté de leur partenaire Nov&atech, pour éclairer les décisions des opérateurs économiques et concrétiser les projets de valorisation des agro-ressources : cartographier des productions (pailles, menues pailles, bois bocager, fumier et lisiers…) et préciser les conditions de mobilisation, connaître le potentiel des biomasses (rendement / coût) et leurs atouts environnementaux, mettre en place des expérimentations pour adapter la production aux exigences des filières (ex : chanvre textile, chenevis alimentaire), établir des scenarii logistiques ou encore conduire des projets collaboratifs (ex : montage du Pôle d’excellence rurale “Création d’une filière de valorisation du chanvre”, projet méthanisation) …

 - © Alcimed/Ademe

L’agriculture normande, actrice de l’économie verte

L’agriculture normande est déjà positionnée sur les marchés croissants de l’économie verte : lin textile et chanvre, diester et éthanol, amidon, miscanthus, huiles essentielles… Avec plus de 40 000 ha de lin, la Normandie est la première région productrice de lin en Europe. 10 entreprises y défi-brent le lin. Parmi les valorisations les plus novatrices, le lin entre désormais dans la constitution des automobiles (aillons arrière, portière, plafonnier) ou encore de matériaux de sport (raquette, coque de bateau…). Les composites proposés par 5 entreprises normandes (Dehondt, LINEO, Ecotechnilin, Terre de Lin, Depestele) sont notamment appréciés pour leur légèreté qui permet de diminuer les consommations des automobiles, leur pouvoir isolant thermique et phonique, leur résistance au choc et leur capacité à amortir des vibrations, leur renouvelabilité et leur bilan carbone faible. Deux unités défibrent désormais le chanvre en Normandie, la Coopérative de teillage de lin du Neubourg (27) et Agrochanvre (50).La Normandie accueille la plus grande unité au monde de production de Diester et une unité de production d’éthanol et d’amidon (sociétés Diester Industrie et Terreos).La région tient également la première place pour la production de colza érucique en France, avec 13 000 ha soit plus des deux tiers de la production nationale. Le colza érucique, collecté par l’union de coopérative Pollen, répond au besoin des industries en tant que lubrifiant et base pour l’industrie chimique (solvants, détergents, plastifiants, tensioactifs, adoucisseurs textiles, produits cosmétiques, adjuvants). On trouve également en Normandie 250 hectares de miscanthus pour le paillage et l’énergie (UCDV et Gralimis), 200 hectares de thym, monarde, menthe… transformés en huiles essentielles destinées aux industries pharmaceutiques, parfumeries, industries cosmétiques et utilisateurs d’arômes alimentaires naturels (Normandie Arômes).